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Principales inquiétudes, analyses et recommandations
le 5 novembre 2010
Principales priorités
- Accès aux soins de santé physique et mentale
- Décès en établissement
- Conditions de détention
- Questions autochtones
- Accès aux programmes
- Femmes purgeant une peine de ressort fédéral (priorité horizontale)
I. Accès aux soins de santé physique et mentale
Embaucher du personnel pour relever les défis en matière de santé mentale
- Dans les établissements correctionnels fédéraux, le nombre de cas de problèmes de santé mentale est à la hausse. Un détenu nouvellement admis dans le système correctionnel présente une forme quelconque de troubles mentaux.
- Le système carcéral est aux prises avec plusieurs défis en matière de capacité, d’accessibilité et de qualité des soins. Il connaît également des retards relativement au recrutement et au maintien du personnel responsable des soins de santé mentale.
- Vingt pour cent des postes de psychologues sont vacants.
Recommandations
- Améliorer les efforts de recrutement de professionnels de la santé mentale, envisager la possibilité d’obtenir des exemptions du taux de rémunération et travailler avec les organismes de réglementation professionnelle concernant le champ d’activités, la formation, la transférabilité et le perfectionnement professionnel.
- Renouveler les normes de recrutement des agents de correction pour s’assurer que les nouvelles recrues possèdent les connaissances, les compétences personnelles et le niveau de scolarité requis pour gérer le nombre croissant de délinquants ayant un profil de troubles mentaux.
Gestion des cas d’automutilation
- Le nombre de cas d’automutilation augmente. Au moins 25 % des détenues ont des antécédents en matière d’automutilation.
- Pour gérer ce problème, il est nécessaire d’investir dans les infrastructures spécialisées, le recrutement d’experts, l’achat d’outils cliniques et la recherche.
Recommandations
- Réviser la Stratégie nationale et le plan d’action national pour traiter des besoins des délinquants qui s’automutilent, afin de se pencher précisément sur les préoccupations documentées qu’a soulevé le BEC. Cette stratégie et ce plan d’action devraient comprendre :
- une stratégie de financement permanent;
- un programme ou un plan de traitement éprouvé étayé par la recherche clinique;
- un engagement à offrir un environnement physique propice à une approche thérapeutique axée sur le patient et sur le continuum de soins pour gérer les cas d’automutilation dans les établissements.
- Élaborer un Plan de gestion clinique ( PGC ) pour tous les délinquants qui s’automutilent ou font une tentative de suicide en établissement. Le PGC sera mis à jour périodiquement pour qu’il servce d’outil dans le cadre du continuum de soins.
Utilisation du matériel de contrainte physique
- Il ne faut jamais considérer comme un cas de recours à la force devant être signalé une situation où le délinquant se conforme de son gré au recours au matériel de contrainte.
- Les contraintes physiques devraient être reconnues comme un moyen d’intervention extraordinaires devant être appliquées en tout dernier recours et aussi brièvement que possible.
- Le Service correctionnel du Canada ( SCC ) doit fournir des lignes directrices plus rigoureuses en matière d’éthique ainsi que des instructions cliniques pour régir le recours aux contraintes physiques. Exemple : le consentement à un traitement.
Recommandation
- Fournir en priorité une version révisée des directives du commissaire intitulées Prévention, gestion et intervention en matière de suicide et d’automutilation et Utilisation de matériel de contrainte pour des raisons de santé , qui seront conformes aux pratiques exemplaires reconnues ainsi qu’aux normes de justice pénale sur le traitement des détenus de l’American Bar Association (Criminal Justice Standards on the Treatment of Prisoners).
Soins intermédiaires en santé mentale
- La transition entre un milieu axé sur le traitement et un milieu axé sur les méthodes thérapeutiques, comme les centres régionaux de traitement, pose souvent problème, ce qui met en évidence le besoin d’avoir des unités de soins intermédiaires et de meilleurs outils permettant l’échange de renseignements entre le personnel clinique et de première ligne.
Recommandations
- Désigner au moins une unité de soins de santé intermédiaires par région et mettre en place une capacité spécialisée de soins intermédiaires (en sus des unités en milieu de vie structuré actuelles) pour les délinquantes.
- S’assurer qu’un Plan de gestion clinique à jour soit remis à tous les délinquants qui sortent d’un centre de traitement régional pour retourner à leur institution d’origine. Ce plan devrait contenir des renseignements et des consignes de base à communiquer au personnel de première ligne, dont le contenu respecte les normes de protection des renseignements personnels et de confidentialité.
Isolement et santé mentale
- La population en isolement à long terme (d’une durée de plus de 60 jours) augmente. Le nombre moyen de jours passés en isolement est de 95. En 2008-2009, le nombre de délinquants placés chaque jour en isolement s’élevait en moyenne à un peu plus de 900.
- Le nombre élevé de cas d’isolement soulève des inquiétudes relativement aux effets négatifs de l’isolement cellulaire sur la santé mentale et le potentiel de réintégration des délinquants.
- L’environnement à sécurité maximale au sein de l’Unité spéciale de détention ( USD ), qui est restrictif, ne favorise pas le traitement des problèmes graves de santé mentale. Ces unités ne devraient pas servir à garder les délinquants aux prises avec des problèmes de santé mentale, qui ne peuvent être placés ailleurs dans le système correctionnel.
Recommandations
- Interdire l’isolement prolongé des délinquants ayant un problème grave de santé mentale.
- Mener un examen expert et indépendant de l’état de santé mentale des détenus logés à l’Unité spéciale de détention ( USD ), qui comprendrait des options et des recommandations en vue de la gestion de ces délinquants par les moyens les moins restrictifs et les plus appropriés possible sur le plan clinique.
Soins de santé physique
- Le taux de prévalence des maladies infectieuses, comme l’hépatite C et le VIH, augmente. Trente pour cent de la population carcérale est infectée par l’hépatite C.
- Une bonne santé en établissement carcéral, c’est également synonyme d’une bonne santé publique. Les délinquants n’ont pas accès aux mêmes mesures de réduction des méfaits que dans la collectivité.
- La population carcérale est « grisonnante » et pose un défi en matière de santé physique :
- gestion des maladies et des problèmes de santé graves provoqués par le vieillissement;
- déplacements physiques;
- vivre de façon indépendante;
- soins palliatifs.
Recommandations
- Fournir un éventail complet de mesures de réduction des méfaits aux détenus fédéraux.
- Faire une analyse complète de la santé des détenus âgés de 50 ans et plus, élaborer une stratégie visant à répondre aux besoins actuels et futurs en matière de soins de santé physique dans les domaines de l’hébergement, de l’élaboration de programmes, des soins pour maximiser l’indépendance et de la mise en liberté sous condition pour des motifs de compassion.
II. Décès en établissement
Généralités
- Entre 1998 et 2008, 532 détenus sont décédés dans les établissements fédéraux. Dans les pénitenciers fédéraux, le taux de suicide est sept fois plus élevé que la moyenne nationale.
- Au cours de l’exercice 2009-2010, le BEC a procédé à des évaluations trimestrielles des progrès du SCC en matière de prévention des décès en établissement.
- Le SCC est prêt à réduire le nombre de décès en établissement; toutefois, il doit apporter des améliorations dans les domaines suivants :
- les interventions en cas d’urgence médicale;
- la surveillance des indicateurs de suicide;
- la gestion des délinquants ayant des problèmes de santé mentale;
- la qualité et la fréquence des patrouilles de sécurité;
- faire le juste équilibre entre les normes de sécurité et les principes de préservation de la vie;
- la qualité des rapports d’enquête internes.
Recommandation
- Rendre public au cours de l’exercice financier 2010-2011 le document du SCC intitulé Cadre de responsabilité en matière de rendement pour réduire les décès évitables en établissement et faire de ce document un dossier public pour le suivi annuel des progrès dans ce volet des services correctionnels.
D’examen de cas de décès
- Le SCC a mis en œuvre une solution de « rechange » à l’exercice de l’article 19, qui vise à examiner les cas de mort naturelle, mieux connue sous le nom de processus d’examen de cas de décès.
- En 2009-2010, le BEC a examiné un peu plus de 100 cas de mort naturelle visés par le processus d’examen de cas de décès.
- Le BEC s’inquiète du fait que le processus d’examen n’a pas la rigueur et l’intégrité nécessaires pour relever les erreurs, prendre les mesures correctives requises et réduire les décès en établissement évitables. Certaines lacunes ont été détectées dans les lignes directrices actuelles du processus d’examen :
- pas de membres externes;
- pas d’examen indépendant;
- absence d’exposés analytiques ou de commentaires cliniques;
- examen et suivi modestes de la part des cadres supérieurs.
Recommandation
- Suspendre immédiatement l’examen de cas de décès jusqu’à ce que l’on puisse faire valider les lignes directrices de façon indépendante et experte pour satisfaire aux exigences de l’article 19 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition . Par souci de transparence et d’imputabilité, les résultats de cet examen devraient être rendus publics.
III. Conditions d’isolement
Généralités
- Les conditions d’isolement deviennent de plus en plus restrictives. Dans les établissements à haut niveau de sécurité, les détenus n’ont pas souvent l’occasion d’entrer en contact avec d’autres détenus, de se déplacer ou de se réunir.
- Les détenus passent plus de temps dans leurs cellules en raison du nombre croissant de cas d’interruptions des activités dans l’établissement, de fouilles « exceptionnelles » et d’horaires « modifiés ».
- Ces activités perturbent le quotidien et nuisent à l’accès aux programmes, aux visites et au privilège des contacts avec autrui.
- De bonnes pratiques de sécurité active sont essentielles à la santé et à la sécurité générale des détenus ainsi que du personnel.
Recommandation
- Renforcer, notablement, les pratiques et les principes de sécurité active et mettre en œuvre les recommandations formulées par le Groupe de travail sur les établissements à sécurité moyenne, qui fait valoir la nécessité de formations d’appoint supplémentaires et obligatoires sur la sécurité active.
Surpopulation
- Au cours des cinq dernières années, le recours au placement en double occupation a augmenté de 50 %; à l’heure actuelle, un détenu sur dix se trouve dans cette situation. On rapporte des cas de double occupation dans les unités d’isolement et les unités de garde en milieu fermé des établissements régionaux pour femmes.
- Les taux élevés de placements en double occupation entraînent d’autres problèmes, y compris la capacité limitée de transférer les délinquants dans des établissements à sécurité minimale avant qu’ils retournent dans leurs collectivités.
- Selon les estimations, la population carcérale continuera de croître, et les établissements à sécurité moyenne auront les plus importantes contraintes de population. Nous pouvons nous attendre à une recrudescence des incidents de violence en établissement.
Recommandations
- Appliquer en temps opportun et de façon complète les critères servant à l’évaluation des détenus pour le placement en double occupation, et faire mener des examens par les autorités régionales de façon périodique, c’est-à-dire à tous les trimestres.
- Mener un examen des cas des délinquants incarcérés en établissement à sécurité moyenne que la Commission nationale des libérations conditionnelles ( CNLC ) a libérés directement dans la collectivité, et de déterminer pour quelles raisons on ne logeait pas ces délinquants dans un établissement à sécurité minimale avant leur mise en liberté.
- Rendre public le plan à long terme en matière d’immobilisations, d’installations et d’exploitation lorsqu’il sera approuvé par le Conseil du Trésor, y compris les prévisions de la population carcérale, les dépenses en capital prévues pour les nouvelles constructions et les coûts d’entretien permanents.
Autres formes d’isolement
- De plus en plus d’unités et de rangées à condition semblables à l’isolement sont gérées sans tenir compte des politiques et des garanties procédurales en vigueur.
- En vertu de la loi, il existe seulement deux types de détenus : la population générale et les détenus en isolement préventif.
Recommandation
- Le ministre demandera au SCC de mener dans les plus brefs délais un examen de tous les cas de détenus placés dans des unités à conditions semblables à l’isolement pour s’assurer de leur accorder les mêmes protections imposées par la loi et le même accès aux programmes dont jouit la population générale.
Politique sur le recours à la force
- Au cours de l’année dernière, le nombre d’incidents liés au recours à la force a augmenté de 25 %, malgré que la politique ait été récemment modifiée afin que l’on ne considère plus l’exposition d’une arme à feu comme un recours à la force devant être signalé.
- Il est nécessaire de faire part de ces incidents pour s’assurer que le personnel agit conformément à la politique et au principe du recours aux mesures les moins restrictives possible. L’exposition d’une arme à feu est un acte de force dont le SCC devrait être responsable.
- L’examen des incidents entourant les recours à la force que mène sur le BEC permet de dégager plusieurs domaines où il y a un manque de conformité :
- options les moins restrictives possible;
- politique sur les entregistrements vidéo;
- utilisation de cloisons;
- procédures de décontamination;
- Contrôle des suivis de soins de santé.
Recommandation
- Que tous les incidents comportant l’emploi d’agents chimiques ou d’aérosols inflammatoires ou les incidents où l’on expose, brandit ou pointe une arme à feu, y compris quelque usage menaçant ou implicite d’une arme, soient considérés comme un recours à la force devant être signalé.
IV. Questions autochtones
Analyse
- Les délinquants autochtones représentent tout près de 20 % de la population carcérale. Au cours de la dernière décennie, le nombre de délinquantes autochtones a augmenté de près de 90 %.
- L’écart s’accentue entre les délinquants autochtones et non autochtones. Ces derniers
sont :- libérés plus tard au cours de leur peine;
- surreprésentés dans la population carcérale en isolement;
- plus souvent maintenus en incarcération jusqu’à leur libération d’office;
- plus souvent associés à un taux de risque plus élevé et à des besoins plus grands;
- Selon les pratiques actuelles, le SCC n’est pas tenu de dévoiler comment les principes de l’arrêt Gladue influencent les décisions entourant les délinquants autochtones.
Recommandations
- Exiger que le SCC fournisse des preuves claires et documentées selon lesquelles les principes de l’arrêt Gladue sont pris en compte dans la prise de décisions mettant en cause les droits et libertés conservés des délinquants autochtones dans les domaines suivants : placements en isolement, accès aux programmes, échelles de classement par niveaux de sécurité, placements pénitentiaires, accès à la collectivité, mise en liberté sous condition et transfèrements imposés.
- Utiliser pleinement les articles 81 et 84 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
V. Accès aux programmes
Analyse
- Un trop grand nombre de délinquants ne peuvent avoir accès aux programmes dont ils ont besoin au moment opportun. En tout temps, moins de 25 % de la population carcérale participe aux programmes correctionnels.
- Des recherches démontrent que les programmes favorisent un plus grand nombre de mises en liberté sous condition et des taux de réadmission et de récidive plus faibles.
- Une grande proportion de la population carcérale a des antécédents d’instabilité d’emploi ou de lacunes en matière de compétences professionnelles, comme la fiabilité et la capacité de travailler avec les autres.
- Grâce aux programmes d’emploi des prisons et aux programmes de formation professionnelle, comme les prisons agricoles, les délinquants peuvent acquérir des compétences transférables et apprendre d’importantes leçons de vie.
Recommandation
- Exiger qu’avant de mettre fin à toute activité des agroentreprises de CORCAN, le SCC produise un rapport public expliquant par quoi les fermes agricoles seront remplacées. Le rapport devrait également indiquer en détail quels types de formation professionnelle et de compétences favorisant l’employabilité le SCC envisage d’offrir dans le système correctionnel fédéral, notamment comment il prévoit s’y prendre pour créer des possibilités d’emplois viables, réalistes et intéressantes dans le milieu carcéral, afin de répondre aux besoins actuels et futurs du marché.
VI. Femmes purgeant une peine de ressort fédéral
Analyse
- Au cours de la dernière décennie, le nombre de délinquantes a augmenté de 40 %.
- Les délinquantes ont des besoins et des profils très différents de ceux des délinquants :
- elles sont deux fois plus enclines à recevoir un diagnostic de problème de santé mentale grave;
- elles sont deux fois plus enclines à purger une peine liée aux drogues;
- elles purgent des peines plus courtes;
- un pourcentage élevé d’entre elles a été victime d’abus sexuels ou physiques;
- elles sont plus susceptibles d’avoir des personnes à charge à l’extérieur de l’établissement.
- À l’heure actuelle, il n’existe pas d’établissement autonome à sécurité minimale pour les femmes.
- De récents changements apportés aux politiques ont entraîné une importante réduction de la participation au Programme mère-enfant.
Recommandations
- Revoir les critères d’admissibilité au Programme mère-enfant dans le but de favoriser au maximum une participation sûre.
- Modifier les contrôles du périmètre de sécurité des établissements régionaux pour femmes pour permettre aux délinquantes de niveau de sécurité minimale de résider à l’extérieur de l’enceinte de haute sécurité. Dans les établissements où cela n’est pas réalisable, le SCC devra fournir des logements autonomes aux délinquantes de niveau de sécurité minimale qui résident au sein de la collectivité.
Date de modification
2013-09-16
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